Planifiez vos scénarios : Maintenir son élan en période d’incertitude – Bulletin 5
Alors que nous réalisons l’ampleur de la réponse internationale à la pandémie de la COVID-19, nous constatons qu’il existe une réelle incertitude, voire une peur palpable, quant aux conséquences de cette situation et aux mesures que nous devons prendre en tant qu’organismes et professionnels en réponse à celle-ci. Afin de vous aider à répondre à vos questions, KCI prépare une série de bulletins vous offrant des conseils opportuns sur comment réagir et où mettre l’accent pour mieux maintenir le cap dans cette situation en constante évolution, et ce, tout en maintenant l’élan de vos programmes et de vos activités de collecte de fonds.
PLANIFIEZ VOS SCÉNARIOS
Le présent bulletin offre des conseils sur la manière d’aborder la planification de scénarios pour les revenus tirés de la collecte de fonds. S’il est incontournable que la crise de la COVID-19 aura un impact à court terme sur ces revenus, il est important lorsqu’on cherche à mieux cerner cet impact de ne pas y aller de façon trop rigide. Au contraire, il est essentiel d’examiner et de comprendre les nuances de votre cas précis et, peut-être encore plus important, de vous appuyer sur cette évaluation pour élaborer un plan de réponse.
1. Déterminer l’impact anticipé
La première étape consiste à évaluer et à déterminer l’impact de la situation de la COVID-19 sur vos programmes de collecte de fonds. Pour vous aider à y parvenir, nous avons élaboré un Cadre d’évaluation qui vous permet de désemballer et d’examiner chacune de vos sources de revenus selon deux perspectives, soit la PROFONDEUR et la DURÉE.
La profondeur de l’impact concerne la portée négative de la crise de la COVID-19 sur la capacité de votre programme de collecte de fonds de générer des revenus. Une Faible profondeur se définit comme une baisse de revenu anticipée de 30 pour cent ou moins, et une Grande profondeur, de 30 pour cent ou plus.
La durée de l’impact concerne la durée de cette perturbation à votre programme de collecte de fonds. Une Courte durée serait de trois mois ou moins, et donc une interruption relativement brève, tandis qu’une Longue durée serait de plus de trois mois, et donc une perturbation soutenue.
Utilisant ce cadre, examinez et évaluez chacune de vos sources de revenus afin de déterminer la profondeur de l’impact à prévoir. Ce faisant, n’oubliez pas que différentes sources de revenus ont différentes capacités de résistance en période de crise et de ralentissement économique. L’autre facteur important est le pourcentage de revenus que représentent chacun de vos programmes. Par conséquent, l’incidence globale sur vos revenus dépendra de la nature de chacun de vos programmes de collecte de fonds et sera spécifique à votre situation. L’encadré Impact prévu sur les revenus peut vous aider à mieux concevoir cet exercice.
ENCADRÉ - Impact prévu sur les revenus
DONS MAJEURS (43 % des revenus) : Faible profondeur, longue durée
La profondeur pourrait être plus faible car les dons majeurs sont basés sur de solides relations. Toutefois, l’impact pourrait être de longue durée dans le cas où des décisions ou des versements seraient reportés.
ÉVÉNEMENTS D’ENVERGURE (22 % des revenus) : Grande profondeur, courte durée
Grande profondeur à court terme… mais une occasion d’élaborer des stratégies et de réinventer (ou de simplement retarder)
SOLLICITATION DE MASSE (16 % des revenus) : Faible profondeur, courte ou longue durée
L’approche pourrait rester intacte, mais les difficultés économiques générales pourraient bien avoir un impact négatif sur les résultats à moyen terme.
DONS PLANIFIÉS (8 % des revenus) : Faible profondeur, Courte durée
Étant donné la nature à plus long terme du processus, il est peu probable que l’impact soit majeur
ÉVÉNEMENTS ORGANISÉS PAR DES TIERS (7 % des revenus) : Grande profondeur, Longue durée
Pourraient essentiellement disparaître à court terme et ne pas être une priorité pour ces tiers à moyen terme
DONS MENSUELS (4 % des revenus) : Faible profondeur, Courte durée
L’approche reste intacte, mais les difficultés économiques générales pourraient bien avoir un impact négatif sur les résultats à moyen terme
2. Établir des modèles de scénarios
Ayant fait l’exercice d’évaluation, la prochaine étape est d’établir divers modèles de scénarios. Dans ce contexte d’incertitude auquel nous sommes confrontés, la modélisation de divers scénarios peut s’avérer être un outil utile pour comprendre l’éventail des possibilités… et pour identifier un éventail de réponses. Et n’oubliez pas, alors que vous entreprenez cette partie du processus, de vous laisser guider par un esprit d’optimisme réaliste.
On recommande la création de trois scénarios : 1) Le meilleur des cas (celui souhaité), qui est le plus optimiste de tous les scénarios; 2) Le cas le plus réaliste (planifiez pour celui-ci), qui est le scénario qui vous semble le plus probable; et, 3) Le pire des cas (soyez prêts), soit le scénario le plus sérieux et le plus difficile auquel vous pourriez être confrontés. Une fois ces scénarios identifiés, réfléchissez comment répondre à chacun d’eux.
3. Explorer les possibilités et formuler vos réponses
Il s’agit probablement de l’étape la plus importante. Avec en mains une solide compréhension de la réalité de votre situation spécifique, il est temps de décider ce que vous devez faire dans l’immédiat et à plus long terme. Comment allez-vous confronter la situation? … atténuer les pertes? … récupérer les revenus perdus? Pour y répondre et développer votre plan, il est utile d’y réfléchir en tenant compte des éléments suivants :
- Réinventer… vos programmes. Réfléchissez à la façon dont vous pouvez ajuster vos programmes de collecte de fonds et faire pivoter votre approche. Êtes-vous en mesure de créer de nouveaux programmes pour générer des revenus? Pouvez-vous initier une campagne de dons mensuels pour faire migrer des donateurs vers ce type de contribution? Êtes-vous capables de convertir des commandites en dons assortis d’un reçu d’impôt? C’est le temps ou jamais de réfléchir de manière créative aux façons dont vous pouvez amassez des fonds… et de vous pousser à vous questionner sur certaines des « vaches sacrées » qui font partie de l’éventail de vos activités de collecte de fonds.
- Redéployer… vos ressources. En réponse à ces changements à vos programmes de collecte de fonds, c’est aussi le moment de faire preuve de flexibilité dans l’affectation de vos ressources. Vous aurez peut-être à réaffecter des ressources humaines à de nouveaux programmes de collecte de fonds. Le moment est aussi venu d’engager les membres de votre conseil d’administration et vos bénévoles dans vos efforts de collecte de fonds.
- Peaufiner… votre argumentaire. Évaluez votre argumentaire dans l’optique de sa pertinence dans l’état actuel des choses et dans un monde post COVID-19. Expliquer pourquoi vous êtes pertinents aujourd’hui et démontrez comment vous répondez aux besoins. Trouvez des façons créatives de démontrer, dans la crise actuelle, l’importance de votre organisme et de sa mission… mais éviter tout ce qui pourrait être interprété comme étant intéressés ou défensifs.
- Réduire… vos dépenses. Et il va sans dire que vous vous devez d’examiner toutes les façons de réduire vos dépenses. Mais, dans la mesure du possible, ne procédez à des mises à pied massives qu’en dernier recours. Nous savons par expérience que si des programmes procèdent trop rapidement à des mises à pied lors de ralentissements, ils se retrouvent à l’arrière du peloton quand les choses se stabilisent. Et rappelez-vous, les organismes caritatifs sont inclus dans la Subvention salariale d’urgence du Gouvernement du Canada, un élément important à considérer dans votre prise de décision.
Finalement…
- Impliquer votre conseil d’administration. Assurez-vous d’impliquer les membres de votre conseil d’administration dans le processus. Considérez la possibilité de créer un groupe de travail pour entreprendre avec vous l’ensemble du processus et faites que ce groupe de travail fasse rapport des résultats et des conclusions au conseil d’administration dans son ensemble.
- La résilience de la philanthropie. Consolez-vous du fait que, lors de crises ou de ralentissements économiques antérieurs, le don s’est montré résilient. Bien que nous puissions nous attendre à une baisse des contributions pour une certaine période, le don va rebondir. La profondeur de l’impact et la rapidité de la reprise seront tributaires du redressement du marché boursier et de la rapidité du retour au travail des Canadiens.
- Un sentiment d’appartenance encore plus fort. Bien que nous ne puissions être sûrs de l’impact qu’aura cette crise sur les attitudes et comportements des Canadiens à long terme, il y a de fortes possibilités que la pertinence et l’importance du secteur caritatif seront davantage ressenties à la suite de cette crise… et que les Canadiens se sentiront davantage liés entre eux et à leurs collectivités. Deux éléments qui pourraient mener à une augmentation des contributions philanthropiques avec le temps.
- Ne pas laisser passer cette chance. « Une crise est une terrible chose à gâcher », pour citer l’économiste Paul Romer (paroles que Rahm Emanuel, alors un conseiller du Président Obama, a reprises durant la récession de 2009). Les temps difficiles sont des catalyseurs d’examens, de réflexions et d’évaluations qui souvent mènent à des résultats positifs.
Et n’oubliez pas les rappels généraux suivants…
- Se préparer et répondre…mais ne pas paniquer. Faites ce que vous pouvez. Beaucoup d’éléments échapperont à votre contrôle et il est donc important de cibler votre réflexion, vos efforts et votre énergie là où vous avez de l’influence.
- Gardez le cap, soyez positifs et restez confiants. Donnez une impression de stabilité, de confiance et de capacité dans toutes vos activités et vos communications, tant à l’interne qu’à l’externe.
- Il n’y a pas qu’une seule stratégie. Quoi qu’il soit bon de se laisser guider par des lignes directrices et des pratiques exemplaires, les meilleures stratégies seront celles qui seront adaptées à chaque institution et à ses clientèles.
- Ce n’est pas la première fois que nous nous retrouvons dans une situation semblable. Mettez à profit les leçons que vous avez tirées de situations d’urgences et de désastres antérieurs. Nous avons déjà surmonté des périodes de crises et nous le ferons encore cette fois-ci.
- Ne fermez pas boutique. Gardez le cap tout en ajustant avec prudence votre stratégie et votre budget. Nous savons par expérience que ceux qui agissent ainsi s’en tire plus solidement.
- Tout en vous assurant de ne pas submerger vos parties prenantes de communications superflues, il faut aussi éviter le silence radio. Gardez vos parties prenantes, tant internes qu’externes, engagées et informées.
Nous souhaitons pouvoir vous aider à identifier ces « bonnes choses au bon moment », et notre prochain bulletin traitera du développement de votre argumentaire pendant et après la crise de la COVID-19.